Pour améliorer la lutte contre le terrorisme, le ministère de l’Intérieur propose toute une série de mesures permettant de mieux identifier les internautes et de capter leurs échanges.
Le gouvernement français veut en finir avec l’anonymat sur Internet. Ce week-end, le journal Le Monde a révélé une série de mesures législatives particulièrement liberticides que le ministère de l’Intérieur aimerait faire passer dans les projets de loi en cours d’élaboration.
Parmi elles: “interdire les connexions Wifi libres et partagées” durant l’état d’urgence et supprimer les “connexions Wifi publiques”, en raison de la difficulté d’identification des personnes connectées. Il en serait alors fini avec le surf Internet dans les Starbucks, les bibliothèques, les parcs, les jardins, etc. Les opérateurs devraient, par ailleurs, mettre le holà sur leurs réseaux Wifi partagés tels que Free Wifi ou SFR Wifi. Ce qui risquerait donc de changer la vie pour beaucoup d’utilisateurs.
Autre mesure choc: “interdire et bloquer les communications des réseaux Tor en France”. Contrairement au Wifi, cette mesure impacterait beaucoup moins de personnes. Ce logiciel est utilisé par une minorité d’internautes particulièrement sensibles à l’anonymat. Les cybercriminels et les terroristes utilisent très probablement Tor, mais aussi beaucoup d’autres individus comme les journalistes, les lanceurs d’alerte ou les défenseurs des droits citoyens.
En revanche, l’interdiction de Tor serait techniquement plus difficile à réaliser, car il s’agit d’un réseau opéré au niveau mondial et totalement décentralisé. Il n’est pas possible de contacter un opérateur pour le fermer, comme cela peut être possible pour les réseaux Wifi publics ou partagés. Certains pays autoritaires, comme la Chine, bloquent déjà ce réseau d’anonymisation, avec plus ou moins de succès.
Obtenir les clés de chiffrement
Le Wifi et le réseau Tor ne sont pas les seules cibles numériques du gouvernement. Dans la liste de mesures révélées ce week-end par Le Monde figure également les applications de téléphonie sur Internet (ou VoIP). Le ministère de l’Intérieur souhaitent les “identifier” et “obliger les éditeurs à communiquer aux forces de sécurité les clés de chiffrement”. Là encore, on ne sait pas comment une telle mesure sera techniquement possible.
Certaines applications utilisent, en effet, le chiffrement dit “de bout en bout” pour lequel l’éditeur ne dispose d’aucune clé. C’est le cas, par exemple, de l’application Facetime d’Apple. Que faire, par ailleurs, lorsque l’éditeur ne dispose d’aucune raison sociale en France, où lorsque le logiciel est diffusé de façon open source et qu’il n’existe pas, à proprement parler, d’éditeur?
D’autres idées législatives de ce type avaient déjà filtré dans Le Monde la semaine dernière, comme l’installation systématique d’un GPS sur les voitures de location, la conservation des fadettes pendant deux ans, contre un aujourd’hui, l’élargissement des possibilités de vidéosurveillance dans les lieux publics ou l’utilisation des IMSI-catchers sans autorisation judiciaire.
Toutes ces propositions ne seront pas forcément retenues. Un arbitrage sera fait par le gouvernement. Les mesures sélectionnées devraient être intégrées dans deux projets de loi, l’un porté sur l’état d’urgence, l’autre sur la lutte anti-terroriste. Elles pourraient être présentées au mois de janvier.
avec bfmbusiness