Idées reçues… ou pas ? L’entrepreneuriat féminin a plusieurs étiquettes qui lui collent à la peau, pourtant toutes ne sont pas vérifiées dans les faits. A l’occasion de la journée de la femme, faites le point sur les principaux préjugés à propos des dirigeantes d’entreprise. Passer de 30 à 40 % de femmes chefs d’entreprise d’ici à 2017. C’est le but du plan national lancé en août 2013 par Najat Vallaud-Belkacem, ministre du Droit des femmes, Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, et Fleur Pellerin, ministre en charge des PME, de l’innovation et de l’économie numérique. Tandis que le gouvernement affiche la volonté de promouvoir l’entrepreneuriat féminin, certaines idées persistent sur la question. 1. Les femmes ne sont pas attirées par l’entrepreneuriat FAUX. Les femmes valorisent autant l’entrepreneuriat que les hommes. Elles ne représentent pourtant que 30% des créateurs, repreneurs et dirigeants d’entreprise. Un pourcentage qui n’a pas évolué depuis plusieurs années. Ce constat ne s’explique pourtant pas par un désintérêt général de la gente féminine pour l’entrepreneuriat. “Statistiquement, considérer que les femmes sont moins attirées par l’entrepreneuriat n’a aucun sens”, assure Séverine Le Loarne, professeure-chercheur à Grenoble Ecole de management, spécialiste de l’entrepreneuriat féminin. En effet, selon le rapport sur l’entrepreneuriat féminin réalisé par le Centre d’analyse stratégique (CAS) en avril 2013, 70 % des femmes considèrent l’entrepreneuriat comme un bon choix de carrière, pour 70,1 % chez les hommes. Aussi attirées que les hommes, elles ont en revanche moins souvent l’intention de se lancer. Ainsi, seules 6 % pensent créer ou reprendre une entreprise, contre 10,5 % chez les hommes. 2. Les femmes dirigent plutôt des petites entreprises VRAI. Les entreprises dirigées par des femmes sont plus petites que celles détenues par des hommes, et ce à la fois en terme de chiffre d’affaires que du nombre de salariés. De fait, ces structures comptent en moyenne 0,7 salarié et génèrent un chiffre d’affaires moyen de 71 k€ (contre 1,1 salarié et 150 k€ pour les hommes). Les femmes sont également deux fois plus nombreuses à la tête des entreprises réalisant moins de 76 k€ de chiffre d’affaires. Et elles ne représentent que 13 % des dirigeants d’entreprise de plus de dix salariés en 2009. En revanche, le CAS souligne le fait que passée une certaine taille, les entreprises dirigées par une femme sont en moyenne plus productives et plus performantes. 3. Le premier frein à l’entrepreneuriat féminin est la difficulté à concilier vie privée et vie professionnelle FAUX. La conciliation vie professionnelle et familiale n’est pas une difficulté majeure pour les femmes dirigeantes dans la création, la reprise ou le développement de leur entreprise. Tel est le constat dressé par le baromètre de la Caisse d’épargne sur les femmes entrepreneuses de septembre 2012. En effet, parmi les 624 chefs d’entreprises sondées, 17 % placent la peur de rompre l’équilibre familial au 10e rang des difficultés qu’elles rencontrent dans la création ou la gestion de leur entreprise. En France, l’entrepreneur moyen, homme comme femme, a des enfants et une vie de famille. Les dirigeantes parviennent donc majoritairement à concilier leur vie privée et leur vie professionnelle. Toutefois, les représentations jouent un rôle important et l’âge de la dirigeante entre en considération. “Les femmes de moins de 40 ans ont une représentation plus égalitaire du couple où la question de l’enfant ne repose pas essentiellement sur elle, souligne Séverine Le Loarne. C’est donc souvent une problématique assez bien gérée. Pour celles de plus de 40 ans, certains stéréotypes dans la représentation de la femme peuvent rendre la question de la maternité plus compliquée”. Parallèlement, la vie familiale peut être vue comme un facteur positif. Les entreprises dirigées par des femmes en couple ont par exemple un taux de pérennité supérieur à celles dirigées par des femmes seules avec 71,2 % contre 68,7 %. 4. Les femmes ont plus de difficultés à trouver des financements VRAI. En termes de financement, si hommes ou femmes rencontrent les mêmes difficultés, certaines discriminations sont à déplorer : le taux de rejet de crédit bancaire, de 2,3 % pour les hommes, atteint 4,3 % pour les femmes. Pourtant, elles ne sont pas plus nombreuses que leurs homologues masculins à relever cette difficulté. La raison ? Des demandes de financement moins fortes. “Les établissements bancaires remarquent que les femmes demandent globalement moins de prêts ou des prêts moins importants”, rappelle Eva Escandon, présidente du réseau Femmes chefs d’entreprise. Les projets portés par les femmes requièrent, en général, un capital initial plus faible. Ainsi, elles sollicitent moins le levier bancaire car les dispositifs d’aides publiques existants et leurs fonds propres suffisent. Cette réalité est principalement due aux secteurs d’activité choisis par les femmes qui nécessitent moins de capitaux, notamment dans la phase d’amorçage. 5. Les femmes créent plutôt des entreprises dans le domaine des services à la personne VRAI. Les entreprises dirigées par les femmes se trouvent principalement dans le secteur des services à la personne et plus généralement dans le BtoC. “Globalement, les femmes se tournent vers des secteurs traditionnellement plus féminins, dans le tertiaire ou les services. Par contre, dans les secteurs plus masculins comme l’industrie ou le bâtiment, les femmes chefs d’entreprise sont beaucoup moins nombreuses”, remarque Eva Escandon. Grand vainqueur : le commerce. Elles sont 30 % à s’y engager. Suivent le service aux entreprises, le secteur de l’enseignement, la santé et l’action sociale, puis, les services aux ménages. 6. Les femmes ont un management plus participatif que les hommes VRAI et FAUX. Il y a en France un débat sur les qualités managériales qu’il faut considérer comme féminine ou masculine. Les études parues récemment sur le sujet ne parviennent pas à s’accorder. D’un côté, certaines peignent le portrait d’un management plus collectif et plus transparent. Les femmes seraient ainsi plus enclines à mettre en avant leur équipe et à faire évoluer leurs collaborateurs. “Les femmes vont avoir tendance à demander l’avis de leurs collaborateurs pour prendre des décisions mais, paradoxalement, elles délèguent moins que les hommes”, révèle Séverine Le Loarne. De l’autre, des travaux récents basés sur la perception qu’ont les collaborateurs de leur manager soulignent le peu de différences entre les deux sexes. Les chercheurs décrivent ainsi un modèle de management asexué où hommes et femmes partagent les mêmes qualités : charisme, courage et empathie. 7. La France est en retard sur l’entrepreneuriat féminin par rapport aux autres pays occidentaux FAUX et VRAI. Du point de vue des opportunités d’entreprendre, seuls les États-Unis, l’Australie et l’Allemagne sont plus propices que la France à l’entrepreneuriat féminin. “En France, certains aménagements favorisent l’entrepreneuriat. Le système de prise en charge des enfants, en bas âge ou en périscolaire, est plutôt meilleur que chez nos voisins et on communique beaucoup sur les femmes entrepreneurs dans les médias ou dans le système éducatif”, rappelle Séverine Le Loarne. Toutefois, dans les chiffres, la France reste assez en retard sur ses voisins occidentaux. Aux États-Unis par exemple, les femmes représentent près de 50 % des créations d’entreprises. Pour cause, c’est dans l’hexagone que les représentations ont le plus fort impact (négatif) sur l’entrepreneuriat féminin. Ainsi, la France est le pays occidental où le pourcentage de femmes ne se sentant pas capables de créer leur entreprise est le plus élevé : 64,8 %. Dans les faits, moins de 1% des Françaises de 18 à 64 ans ont créé une entreprise en 2009. Elles sont en revanche 1,8 % en Allemagne et au Royaume-Uni, ainsi que 2,9 % aux États-Unis.
avec chefdentreprise