Le géant de la distribution dévoile, ce mardi 23 janvier, son “plan de transformation”. Il annonce une accélération de sa stratégie numérique, mais également des réductions d’effectifs.
Arrivé cet été à la tête de Carrefour, Alexandre Bompard joue gros ce mardi en annonçant son “plan de transformation”. Le plan “Carrefour 2022”, qui vise à faire du groupe le leader mondial de la transition alimentaire, prévoit 2400 suppressions de postes dans les sièges du groupe en France, via un plan de départs volontaires. Le groupe va engager des réductions de coûts de 2 milliards d’euros par an.
Par ailleurs, Carrefour veut accélérer dans le bio, le commerce en ligne et de proximité. Et il prévoit de devenir un acteur omnicanal de référence avec un investissement de 2,8 milliards d’euros dans le digital d’ici 2022 et 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires dans le e-commerce d’ici 2022. Une stratégie semble-t-il bien accueillie en Bourse puisque le titre Carrefour monte de plus de 4% dans les premiers échanges parisiens.
Le PDG de Carrefour affirme qu’il n’y a aucun projet de fermetures d’hypermarché en France. Il a ajouté: “Nous allons optimiser la gestion de notre parc (immobilier) et nous allons céder pour 500 millions d’euros d’actifs non stratégiques au cours des 3 prochaines années”.
Carrefour va mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) pour les 2.100 salariés des 273 ex-magasins Dia dont le groupe va se séparer, a déclaré le PDG. L'”ambition” du groupe est de pouvoir faire des “offres attractives de reclassement” à la moitié de ces 2.100 salariés et de trouver des repreneurs pour ces magasins, a ajouté Alexandre Bompard.
Tencent et Yonghui vont entrer capital de Carrefour Chine
Carrefour a également annoncé qu’il “a signé un protocole d’accord avec Tencent et Yonghui pour un investissement potentiel dans Carrefour Chine”. Les détails de l’opération, encore à un stade préliminaire, ne seront connus qu’en cas d’accord définitif.
Parallèlement à ce projet d’investissement, Carrefour et Tencent annoncent la signature d’un “protocole d’accord de coopération stratégique en Chine”, l’objectif étant de mettre en commun l’expertise de Carrefour dans la distribution avec le savoir-faire technologique de Tencent, géant des réseaux sociaux en Chine.
“Gérer l’héritage” des hypermarchés
Le PDG a aujourd’hui deux défis de taille: “gérer l’héritage” des hypermarchés, issus de la précédente révolution commerciale, celle des années 1960, et leur “apporter les nouveautés” de l’ère numérique, afin d’entrer “dans le commerce du XXIe siècle”, explique Philippe Moati, co-président de l’Observatoire Société et Consommation (L’ObSoCo). Avec 12.300 magasins sous enseigne dans le monde et 374.478 collaborateurs, le géant français de la distribution, qui était encore en 2001 n°2 mondial du secteur derrière l’intouchable groupe américain Walmart, occupe désormais la 9e place, dépassé par Amazon (6e), selon le baromètre annuel du cabinet Deloitte.
Mais c’est en France, qui représente près de la moitié du chiffre d’affaires total du groupe (88,24 milliards d’euros) avec ses 115.000 personnes, que Carrefour est le plus exposé. Avant l’annonce du plan, le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly s’était dit “inquiet” du risque d’une “restructuration assez lourde”. “On n’acceptera pas qu’il y ait des licenciements secs”, a-t-il prévenu sur BFM Business.
Le format de l’hypermarché “est au coeur du cyclone”
“En France, Alexandre Bompard est confronté à plusieurs gros dossiers, et en premier lieu celui des hypermarchés”, dont il faut transformer le modèle, expliquait à l’AFP Olivier Salomon, spécialiste de la distribution, directeur au sein du cabinet de conseil AlixPartners. Le format de l’hypermarché, emblématique des années 1960-1970, “est au coeur du cyclone”, renchérit Philippe Moati, pour qui “l’une des portes de sortie serait (d’en) réduire la voilure”, comme il a déjà commencé à le faire, en taillant dans les rayons non-alimentaires.
Mais “on commence désormais à voir des signes de faiblesse sur l’alimentaire, car d’autres formats se sont développés plus en phase avec les attentes des consommateurs”, telles les enseignes de proximité, qui ont le vent en poupe, souligne Philippe Moati. Ces hypermarchés, qui subissent des critiques sur leurs “valeurs”, voient leurs clients se tourner vers des réseaux bios et alternatifs, les circuits courts, les petits commerçants de quartier. “On assiste à une vraie fuite hors du système”, souligne Philippe Moati. Par ailleurs, le groupe accuse du retard sur ses concurrents dans le secteur du numérique, dont le prédécesseur d’Alexandre Bompard, Georges Plassat, n’avait pas anticipé l’ampleur à venir, notamment dans le secteur du drive, où les centres E. Leclerc sont largement majoritaires.
Premier syndicat du groupe, FO avait d’ores et déjà appelé à la grève le 8 février.
Avec bfm