On reconnait les grands historiens.
D’abord par leur volonté de connaitre et de garder les récits transmis ou écrits par des intelligents arabophones rigoureux gardiens traditionnels du patrimoine culturel de leur environnement social. Amadou Tamimou Wane est le prototype des historiens fouineurs, curieux et perspicaces. Il a fait ces humanités auprès du Satigui Ciré Abbas ; Baila ; Birane Wane et tant d’autres érudits qui ont conservé jalousement leurs sources sures de l’identité du Fouta.
La vie de saint-Homme
Dans les années 1960, il a sillonné le Fouta pour approcher, passez-nous l’expression : « les gardiens du temple ». Tel Amadou Windou-Nodi très versé dans la vie de cheikh Oumar Tall, nous vous livrons la première partie intitulée: Demande et réponse.
Demande : Monsieur Amadou Mamadou, vous êtes d’ici ?
Réponse : oui, je suis d’ici, du village de windou-Nodi dont j’ai pris la terminologie d’Amadou Windou Nodi pour m’identifier
Demande : Est-ce l’histoire de Cheikh Oumar que vous voulez nous raconter ?
Réponse : Oui, je connais l’histoire du Fouta, mais je m’identifie à celle de Cheikh Oumar.
Demande : Nous vous écoutons alors commencez
Réponse : Après les chants épiques sur la généalogie de Cheikh Oumar Tall, chants qui constituent l’entrée en matière, Amadou Windou-Nodi entonna la version en ces termes :<< Cheikhou Oumar est né au village de Halwar dans la nuit de mercredi à jeudi, cette nuit-là, le ciel fit entendre dans la région du Nord quatre grondements de tonnerre significatifs parce qu’annonçant chacun un fait événementiel sur cette naissance du Grand Cheikh pour présager des faits sur les péripéties de sa vie.
Ainsi, le premier tonnerre disait : « Qu’il deviendra un Grand Khalife de secte Tijanya, par la volonté même de Cheikh Ahmed Tijane, Fondateur de la secte.
Le second tonnerre disait que la nuit de sa naissance est un signe de révélation qui atténuera les contestations sur l’apparition de la nouvelle lune du mois de Ramadan, évitant ainsi les prières à deux temps.
Le troisième tonnerre faisait savoir à Elimane Saidou et à Sokhna Adama parents du nouveau-né béni, que lorsque leur enfant grandira, il entreprendra le Jihad (la guerre sainte).
Enfin, le quatrième tonnerre informait à ses parents que leur nouveau-né n’était rien d’autre que l’incarnation de leur défunt enfant dévoré par les hyènes au moment qu’ils priaient tous deux le Witr, c’est-à-dire Timiss.
Au huitième jour de sa naissance, l’enfant fut baptisé et plus tard Cheikhou précéda le prénom Oumar pas comme titre universitaire, honorifique ou circonstanciel, loin s’en faut.
Les prénoms Cheikhou Oumar, écrits en arabe se composent de cinq lettres en Cheikh et trois en Oumar. L’ensemble forme huit lettres, chacune à sa définition particulière qui annonce en lui différents dons de Dieu qui feront de lui un homme comblé. La définition des huit lettres que voici résume toute sa mission sur terre.
I Lif = En guerre sainte, il a la faculté de tuer tout individu qui refuserait de se convertir à l’islam.
II Lam = Tout livre qu’il aura lu, une fois, il le conversera en mémoire, et pourra le reproduire textuellement sans en omettre une virgule.
III Chyn = C’est sa résignation totale sur les faits de Dieu.
IV Ya = Pendant 63 ans de sa mission divine, il ne fera au peuple que des bonnes recommandations sur l’islam. Il lui sera loisible d’interdire toute chose en porte à faux avec l’islam sans lever les armes.
V Kha = sa crainte absolue et sa soumission totale à Dieu dépassent celles de tous ses contemporains.
VI Ayin = Il vivra plus de 70 ans, mais n’atteindra pas 80 ans, et sera Érudit de plusieurs disciplines.
VII Mim = Sera fortuné, baignera dans l’opulence et effectuera 160 combats de pacification
VIII Ra = Sera couvert de la clémence et la Miséricorde divine.
Codda Adama Aissé, comme aiment à l’appeler les poètes, c’est-à-dire le Cadet de Adama Aicha Thiam, est né et a grandi à Halwar, où il apprit toute la théologie avant d’aller poursuivre ses études ailleurs. Imbu de toutes les sciences, il revient à Halwar à l’âge de 20 ans pour y rester trois autres années au cours des quels il construisit la Zaouia de Halwar.
Les habitants du saint-village, ses propres parents démolirent sa mosquée prétextant qu’il était précoce pour identifier la maison de Dieu. Cheikhou Oumar alla se plaindre auprès de Alpha Amadou son frère aîné.
Et ce dernier lui dit « N’en fais point cas. Cela n’a aucune importance, je te conseille de garder ton sang-froid, s’il plait à Dieu tu auras à construire dans beaucoup de pays du monde d’innombrables grandes mosquées et Zaouia qui feront date dans l’histoire de l’Humanité ».
Après cette mésaventure qu’il encaissa grâce aux conseils de frère aîné, Cheikhou Oumar acheta une parcelle cultivable à un terrien de Halwar contre de l’or.
Après la décrue des inondations annuelles, juste au moment où il s’apprêtait à faire cultiver son lougan, le terrien qui le lui avait vendu s’en empara et le cultiva pour lui-même. Le Sage Homme ayant perdu son or et sa parcelle s’en alla plaindre encore auprès de son frère et conseiller Alpha Amadou qui lui dit :
« Abandonne cet or à cet homme injuste, Dieu te donnera beaucoup d’or et beaucoup de terre à la place ».
A la quatrième année de son séjour à Halwar, Cheikh Oumar Tall résolut d’effectuer un pèlerinage à la Mecque en passant par la Fouta Djallon. C’est à l’âge de 24 ans, qu’il partit de Halwar un jour de mercredi exactement le même jour de sa naissance, quelques heures après le lever du soleil du mois appelé en arabe « Rabiou Lawal » de l’an 1241 de l’Hégire. Il était accompagné de son petit frère appelé Aliou Saidou dont il était le professeur. Il fit un long séjour au Fouta Djallon auprès d’un marabout savant et sagace professeur qui lui apprit la science mystique.
Ce même professeur décida d’effectuer avec Cheikh Omar le pèlerinage à la Mecque. Mais Cheikh Oumar, bien que consentant lui demanda de l’attendre pour faire ses adieux à ses parents.
De retour au Fouta Djallon, Oumar trouva son professeur parti, car l’ayant longtemps attendu et Oumar le suivit étape par étape.
Arrivé à un certain village de son itinéraire, on lui annonça le décès de son maître à la suite d’une fièvre. On lui présenta ses livres et d’autres objets qu’il avait laissés en mourant.
Contrairement à la vérité populaire qui laisse croire que l’autorisation d’exercer le Wird Tijanya lui provenait de Cheikh Mohammadel Ghaly, c’est bien le professeur Foutanquais du Djallon qui autorisera Cheikh Oumar El Foutyou à exercer le Wird Tjanya et fit de lui le Khalife de la dite secte sur toute l’Afrique du Nord, Après Cheikh Ahmed Tijani lui fit apparu en rêve aux dernières heures de sa vie.
Cheikh Oumar recueillit les livres et les objets de son défunt maître puis continua sa route jusqu’au royaume de Bornou au Nigeria où il trouva un souverain autoritaire, violent, injuste, régnant avec cruauté, sans égard ni pitié en vers les musulmans.
Ce monarque ayant appris l’arrivée de Cheikhou Oumar le convoqua dans sa capitale et lui signifia de confisquer tout or qu’il pourrait disposer.
Cheikh Oumar dit à l’envoyé du souverain en ces termes : « Vous direz à votre souverain s’il plait à Dieu qu’il n’aura pas mon or, si également, c’est le contraire qui lui plait, je ne peux rien contre sa volonté ».