L’obésité est un fléau sanitaire qui touche majoritairement les pays développés. Pourtant, depuis quelques années, les pays émergents sont également touchés de plein fouet par cette pandémie. L’Afrique, continent où la malnutrition et les maladies infectieuses sont endémiques, connaît pourtant une hausse du taux d’obésité dans sa population.
L’obésité comme nouvelle maladie en Afrique entraîne le continent dans une configuration dite de double fardeau : en effet, le continent est celui qui compte le plus grand nombre de maladies infectieuses comme le VIH et le paludisme avec 85,5 % du total mondial des cas de paludisme. Aussi, de plus en plus fréquemment, les fléaux de l’obésité et de la sous-nutrition se retrouvent simultanément dans un même pays africain. Comment expliquer la survenue de cette pandémie en Afrique et comment faire face à ce fléau qui n’est pas encore reconnu comme une maladie par la population ?
L’obésité est définie comme “un excès de masse grasse entraînant des inconvénients pour la santé et une réduction de l’espérance de vie” et une personne est considérée comme obèse lorsque son Indice de Masse Corporelle (calculé à partir de la division du poids en kilos par le carré de la taille en mètres) est supérieur à 30. Il s’agit d’un grave problème de santé publique à travers le monde, puisque de nombreuses maladies y sont liées: les maladies cardiovasculaires le diabète de type 2, certains cancers et des problèmes de santé chroniques.
L’urbanisation et la transition économique comme causes de l’obésité
L’obésité dans le continent noir est le résultat du développement socio-économique, de transformations sociales et environnementales qui ne sont pas accompagnées par des politiques de soutien dans les secteurs de la santé, de l’industrie agroalimentaire ou encore celui de l’éducation. Aussi, l’urbanisation rapide en Afrique prédispose au surpoids.
L’émergence récente de l’obésité en Afrique est en grande partie liée à la transition économique du continent. En effet, cette transition économique est synonyme de croissance et d’urbanisation. L’Afrique est le continent qui connaît actuellement la croissance urbaine la plus rapide du monde, le taux d’accroissement étant de 4,5 % par an. En 2030, la population urbaine du continent devrait dépasser les 50%. Avec l’urbanisation, on assiste à une occidentalisation du mode de vie. Dans les villes, le régime alimentaire a un contenu à forte densité énergétique, contrairement à la nourriture traditionnelle, plus pauvre en graisse et en sucre. Aussi, l’activité physique est réduite. Tandis que le revenu moyen s’élève, les Africains troquent leurs céréales, racines et tubercules pour des régimes plus abondants et plus variés. L’alimentation s’occidentalise, on parle de “transition nutritionnelle.”
Contrairement aux pays développés où l’obésité est considérée comme un problème de santé publique, les Africains n’ont pas encore conscience du caractère néfaste du surpoids. Pour certaines populations africaines, le surpoids est encore considéré comme un signe de bonne santé et de richesse.
Des représentations et des croyances qui favorisent l’obésité
L’urbanisation et les transformations que connaissent les pays africains ne sont pas les seules explications du phénomène relativement nouveau de l’obésité. Si dans les pays occidentaux, il n’y a pas de corrélation entre le poids d’une personne et son statut social, le surpoids en Afrique est en revanche considéré comme un signe de richesse dans certaines sociétés africaines. De surcroit, dans des pays où la malnutrition et les maladies infectieuses sont si répandues, le gain de poids est alors considéré comme un signe de bonne santé. Une étude réalisée auprès de femmes sud-africaines a démontré que celles-ci associaient l’insuffisance pondérale à une maladie telle que le sida.
Une autre étude menée auprès de femmes sud-africaines a également révélé que l’image du corps chez ces femmes est appréhendée autrement que dans les pays occidentaux: sur 217 participantes obèses, seulement 5,9 % se percevaient comme telles. 50,6 % de ces participantes se percevaient comme normales. Cependant, l’influence occidentale commence à nuancer ce tableau. Une étude menée en Gambie démontre que l’attitude envers l’obésité change selon qu’il s’agit de femmes âgées ou de jeunes femmes, ces dernières étant influencées par les critères de beauté occidentaux et se souciant donc de leur poids.