Grâce aux efforts conjugués des gouvernements, des organisations internationales, des ONG et de la société civile, les progrès en matière de lutte contre le VIH/Sida sont constants. En Afrique, malgré les résultats encourageants obtenus ces dernières années, la lutte contre le virus doit encore être intensifiée. Particulièrement en matière de prévention de la transmission mère-enfant (PTME) – un sujet majeur si l’on entend enrayer l’épidémie. Ainsi, sur le continent africain, huit femmes enceintes sur dix reçoivent désormais les services de la PTME, ainsi qu’un traitement antirétroviral.
Ces bons résultats sont encourageants. Ils masquent cependant une réalité plus inquiétante : celle qui concerne la situation des enfants. En effet, seuls 43% des enfants malades du sida sur le continent africain ont accès à un traitement pédiatrique antirétroviral. Notre défi est de changer cet état de fait, d’autant que neuf enfants malades sur dix vivent en Afrique. Et malheureusement, la moitié des enfants qui naissent sur le continent avec le sida meurent avant d’avoir atteint l’âge de cinq ans, faute d’accès aux soins.
La question de l’éradication du VIH/sida pédiatrique revêt donc un caractère urgent et important. Elle passe par deux axes indissociables : une meilleure PTME, d’une part, et un diagnostic plus précoce des enfants, de l’autre.
Tout miser sur la PTME et le diagnostic précoce des enfants
Sur le continent africain, même si les nourrissons nés de mère infectée sont sauvés à la naissance, 50% d’entre eux contractent le virus pendant l’allaitement. La priorité numéro 1 est donc de prévenir la transmission du virus de la mère à l’enfant. Et cela marche ! Depuis 2010, l’élargissement de la PTME au niveau mondial a permis de réduire de moitié, le nombre annuel de nouvelles infections chez les enfants. En 2015, près de huit femmes enceintes ou allaitantes vivant avec le VIH sur dix, ont pu bénéficier de médicaments antirétroviraux, contre seulement 50% en 2010.
Ces efforts sont payants. On estime ainsi que depuis l’an 2000, 1,6 million d’enfants n’ont pas été infectés par le VIH/sida grâce à la PTME. 1,6 million d’enfants non infectés, ce sont autant d’enfants qui peuvent aspirer à une scolarité normale, autant de jeunes et futurs adultes qui pourront mettre toutes les chances de leur côté pour construire leur vie.
L’autre axe d’espoir – et de combat – dans lequel nous devons engager nos efforts, est le développement du traitement du VIH pédiatrique. Pour cela, il faut généraliser le diagnostic précoce des enfants. Dans cette optique, je soutiens fermement les objectifs de l’Onusida, dont j’ai l’honneur d’être Ambassadeur Spécial. L’organisation souhaite ainsi, atteindre 90% d’enfants dépistés, 90% d’enfants malades sous traitement et 90% de charge virale supprimée (objectif 90-90-90). Arriver à dépister précocement les enfants, puis les prendre en charge et les soigner, c’est leur assurer une plus grande longévité, et permettre à de futurs adultes de vivre mieux et, surtout, de ne pas transmettre le virus.
Il s’agit d’un triple objectif ambitieux, je le sais. C’est pourquoi j’ai profité de ma présence en marge de la 72e Assemblée annuelle des Nations Unies, en septembre dernier, pour lancer un appel solennel à l’ensemble de la communauté internationale. Aujourd’hui en effet, les médicaments antirétroviraux dans leur forme pédiatrique restent inaccessibles pour de nombreuses populations. Cette situation est inacceptable. Il faut l’implication et la mobilisation de tous, pour parvenir à un réel changement.
Les firmes pharmaceutiques doivent s’engager
Les gouvernements et les ONG ne peuvent pas tout dans cette bataille. L’industrie pharmaceutique a également sa partition à jouer, si nous voulons mettre fin à la pandémie d’ici 2030. C’est aussi ce que j’ai rappelé au siège des Nations Unies, à New York. Les médicaments antirétroviraux coûtent cher, tout le monde le sait. Nous avons besoin de l’aide des firmes pharmaceutiques, qui doivent tout mettre en œuvre pour corriger cette situation, qui crée un véritable fossé entre les populations du Nord et celles du Sud. La victoire sur le VIH/sida ne sera effective que lorsque le virus sera éradiqué de tous les continents ; dans le cas contraire, il ne s’agira en quelque sorte que d’une rémission.
Afin de faire baisser les prix des traitements, pourquoi ne pas envisager de produire ceux-ci directement là où les populations en ont le plus besoin ? Il faut que les pays les plus touchés par la maladie, au premier rang desquels les pays africains, s’engagent de toutes leurs forces pour favoriser la production locale de médicaments antirétroviraux en général, et sous leur forme pédiatrique en particulier. Cette solution pourrait faire baisser drastiquement les prix d’achat des antirétroviraux, et couvrir de cette façon les besoins importants du continent.
« C’est tous ensemble que nous avons le pouvoir de changer le monde, de réinventer une humanité sans sida », a déclaré à New York l’artiste française Line Renaud, à laquelle j’ai tenu à rendre hommage pour son implication sans faille dans ce combat. « Nous allons vaincre le sida », a-t-elle conclu. Aujourd’hui plus que jamais, cet espoir est permis.
Dominique Nouvian Ouattara, Première Dame de Côte d’Ivoire.