Par un motu proprio publié samedi 9 septembre, le pape François confie aux Conférences épiscopales la responsabilité des traductions liturgiques, une façon de réaffirmer l’autorité de la réforme introduite par le Concile Vatican II en la matière.
Le pape redéfinit les compétences respectives du Vatican et des Conférences épiscopales en matière de traductions liturgiques. Alors que François se trouve en plein voyage apostolique en Colombie, le Saint-Siège vient de publier le motu proprioMagnum Principium (« le principe important », en latin), daté du 3 septembre, il revient sur l’introduction des langues vernaculaires dans la liturgie et les défis que cela a représenté pour l’articulation entre le Vatican et les Conférences épiscopales (lire le texte intégral).
L’enjeu peut être résumé ainsi : « Il fallait unir le bien des fidèles de tous âges et cultures et leur droit à une participation consciente et active aux célébrations liturgiques avec l’unité substantielle du rite romain. »
« Il faut pour cela communiquer fidèlement à un peuple déterminé, par le biais de sa propre langue, ce que l’Église a eu l’intention de communiquer à un autre par la langue latine », poursuit le motu proprio.
C’est précisément ce point qui a pu causer certaines « difficultés » entre le Siège apostolique et les Conférences épiscopales, reconnaît le texte pontifical. En rappelant la nécessité d’une « collaboration pleine de confiance réciproque, attentive et créative » entre les évêques et la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, le pape entend par ce motu proprio réaffirmer de façon plus claire « certains principes » du Concile et redéfinir la responsabilité du Vatican d’une part et des Conférences épiscopales de l’autre.
Précisions sur les compétences
Le motu proprio procède pour cela à des modifications du canon 838 du Code de droit canon, établissant désormais qu’il est de la responsabilité des Conférences épiscopales de « préparer fidèlement les versions des livres liturgiques dans les langues courantes, adaptées convenablement dans la mesure des limites définies, les approuver et publier les livres liturgiques pour les régions de leur compétence, après confirmation du Siège apostolique ».
Quant au Vatican, sa compétence est de « revoir les adaptations approuvées »par la Conférence épiscopale. Mais c’est l’évêque diocésain qui détermine, « dans les limites de sa compétence, les normes en matière liturgique, auxquelles tous sont tenus ».
Ce motu proprio fait suite à de récentes déclarations de François au sujet de la liturgie, un sujet qu’il n’aborde pas fréquemment. « Nous pouvons affirmer, avec sûreté et autorité magistérielle, que la réforme liturgique est irréversible », avait-il assuré fin août devant des centaines de participants à la Semaine liturgique italienne.
Fluidifier la collaboration entre Vatican et Conférences épiscopales
Au mois de janvier, à la demande du pape François, une commission avait été constituée à la Congrégation pour le culte divin pour réviser l’instruction Liturgiam authenticam, source de nombreux blocages. Le motu propriopourrait être une réponse visant à fluidifier les relations entre le Vatican et les Conférences épiscopales en matière de traductions liturgiques.
Publiée en 2001 à la demande de Jean-Paul II, cette « instruction pour la correcte application de la constitution sur la sainte liturgie du concile Vatican II », demandait notamment que le texte latin d’origine soit « traduit intégralement et très précisément, c’est-à-dire sans omission ni ajout, par rapport au contenu, ni en introduisant des paraphrases ou des gloses ».
Dans les faits, cette exigence romaine entraîna de grandes difficultés pour la traduction de l’édition de 2002 du Missel romain. La Congrégation pour le culte divin, présidée par le cardinal Robert Sarah, s’est appuyée sur Liturgiam authenticam pour exiger des épiscopats des traductions littérales de l’original latin.
Les traductions espagnoles et italiennes sont bloquées, de même que la traduction française, dont une première version avait déjà été rejetée par Rome en 2007.
En Allemagne, les évêques, s’opposant « à un langage liturgique qui ne serait pas le langage du peuple », avaient refusé en 2013 le travail de la commission imposée par Benoît XVI et entamé leur propre travail. Celui-ci aurait récemment été rejeté par la Congrégation pour le culte divin. Ce serait justement après que les évêques de langue allemande se sont plaints auprès de lui que le pape François, qui a déjà profondément remanié la composition de la congrégation, a demandé à son secrétaire, Mgr Arthur Roche, de constituer une commission pour dépasser les blocages.
Avec la-croix.com