Ce 30ème Sommet de l’Union africaine(UA) qui devrait se clôturer ce lundi 29 janvier, va marquer un tournant pour l’institution continentale. Avec l’arrivée de Paul Kagamé au perchoir de la présidence tournante, l’UA va tenter de mettre en œuvre, face aux réticences et aux oppositions, l’épineuse question de sa réforme. Plusieurs chefs d’Etat –parfois peu ou très attendus- ont brillé de leur présence ou par leur absence.
Peut-être le signe d’un renouvellement soft de la classe dirigeante en Afrique. En effet, de nouveaux chefs d’Etat font leurs premiers pas dans l’allée de la grand-messe continentale à côté de leurs pairs habitués à ces réunions.
Weah, Lourenço, Mnangagwa font leurs premiers pas à Addis-Abeba
A peine son costume de nouveau président enfilé lors de son investiture, il y a une semaine, George Weah a été accueilli à la tribune sous les ovations pour son premier discours dans l’African Hall d’Addis-Abeba. Dans le sillage du nouvel entrant, Uhuru Kenyatta, investi après la houleuse élection présidentielle, a prouvé avec sa présence qu’il tient bien les rênes du State House de Nairobi.
Sans véritable maîtrise du protocole et des coutumes de l’UA, le président angolais Joao Lourenço est entré dans le tour de table de la réunion biannuelle des chefs d’Etat pour y affirmer le poids politique de l’Angola en Afrique centrale et plus largement sur le Continent. Emmerson Mnangagwa n’a rien à leur envier.
Le «Crocodile » d’Harare retrouve une certaine légitimité continentale après l’épisode du coup d’Etat déguisé sous l’appellation de « transition assistée ». A l’approche de la présidentielle à laquelle il sera candidat sous les couleurs de la Zanu-PF, le nouveau président du Zimbabwe s’est même permis de donner des nouvelles rassurantes sur Robert Mugabe. « Camarade Bob », « votre frère va bien ! », a lancé le nouveau maître d’Harare, sous une flopée d’applaudissements.
Mais une autre présence a marqué les esprits. Alors que l’ANC tergiverse sur le moment de lancer une procédure d’impeachement, Jacob Zuma s’est offert le luxe d’assister à la réunion des chefs d’Etat. Sans doute pour y faire du lobbying pour calmer la tempête judiciaire qui risque de s’abattre sur lui dans les prochains jours.
Loin de ce scénario mais dans une situation judiciaire plus grave, Omar El Béchir continue de narguer la CPI de Fatou Bensouda. En proie à une crise économique et sociale dans son pays, le président du Soudan ne manque presque jamais une occasion de venir aux réunions de l’UA pour s’assurer du parapluie anti-justice de ses pairs.
Enfin, l’éternel boubou blanc de Yahya Jammeh a plané dans le huis-clos des chefs d’Etat. “Nous ne sommes plus un syndicat de chefs d’Etats qui se protègent les uns, les autres”, a lancé Alpha Condé dans une allusion à peine voilée aux Chefs d’Etat déchus ou qui sont en position de l’être. Mais depuis Malabo, Teodoro Obiang Nguema a clos le débat dans une allocution à la télévision au cours de laquelle il garantit l’immunité à l’ex-autocrate gambien. Du moins tant qu’il sera en place à Malabo.
Sommet sans Mohamed VI, Bouteflika, IBK, Khalifa Haftar…
Aux abonnés absents, Joseph Kabila. Une funeste coutume dans les palais présidentiels africains veut que le chef d’Etat ne fasse pas de voyage à l’étranger lorsque des troubles sociaux secouent le pays, pour éviter les coups d’Etat. Après son discours-bilan raté, en crise avec l’Eglise et la communauté internationale, le président congolais a peut-être suivi cette règle non écrite. Il est resté à Kinshasa.
Pour d’autres raisons, notamment médicales, la silhouette d’Abdelaziz Bouteflika n’a pas fait son apparition à la réunion des chefs d’Etat. Le chef de l’Etat algérien à qui on prête des velléités de candidature à la prochaine présidentielle, était représenté par son Premier ministre, Ahmed Ouyahia.
La multiplication des attaques contre les Forces armées maliennes(FAMa) pour lesquelles trois jours de deuil national ont été décrété, est la justification principale qui a retenu Ibrahim Boubacar Keïta à Bamako. A la place d’Addis-Abeba, le président malien s’est rendu à Boni, lieu de la dernière attaque contre les soldats maliens.
Autre absence remarquée, celle du roi du Maroc. Alors que le retour du pays nord-africain était un des grands enjeux du 29ème Sommet, le roi Mohammed VI s’est fait représenter par le chef du gouvernement Saad Eddine El Othmani. Ce dernier a présenté les grandes lignes du rapport sur les migrations dont le roi du Maroc est en charge dans le cadre des réformes de l’UA.
En attendant de voir apparaître Fayez Serraj, le chef du Gouvernement national de transition en Libye, Paul Kagamé qui a reçu le marteau de la présidence des mains d’Alpha Condé, gouvernera l’institution panafricaine avec un triumvirat de vice-présidents. Il sera secondé par Alpha Condé pour l’Afrique de l’Ouest, Fayez Al Serraj pour l’Afrique du Nord, Jacob Zuma pour l’Afrique australe et Denis Sassou Nguesso pour l’Afrique centrale.
Au terme de son mandat, le Rwandais passera le relais à Abdel Fattah Al Sissi qui siégera jusqu’en 2019. Un signe de ces pairs qui le conforte dans l’idée de se faire réélire à la tête de l’Egypte.
Avec latribuneafrique